Encore libre, encore vivant

Les humains m'appellent Théo. Je trouve étrange ce nom, mais je m'y suis habitué.
Quand je vivais dans l'océan, on m'appelait de manière différente de celle des hommes, C'était plus simple et plus efficace.
On se sentait bien ensemble, ma famille, mes copains et moi. On errait en haute mer et rien ne semblait troubler notre beau monde bleu.
Les plus vieux nous racontaient souvent qu'autrefois l'océan était un vrai paradis. Propre, riche.

Moi, je suis né et j'ai grandi à travers des bizarreries que les humains déversent dans les eaux. J'ai appris à les éviter. Ce truc ne réussit pas toujours à toutes les créatures dont la maison est l'océan.
Les humains, je ne sais pas si je l'ai mentionné, se considèrent les maîtres de la planète. Drôles de maîtres, vu leur hostilité envers la nature.

Je les suivais parfois, les humains, ils avaient l'air intéressant et ils pouvaient faire des choses extraordinaires.
Il y en avait qui m'épouvantaient, mais ce n'était pas toujours facile de les différencier, puisque les gens ont le pouvoir de dissimuler, pouvoir qui nous fait défaut à nous, les dauphins.

Un jour, je me suis aventuré loin de mon groupe.
Soudain, je me suis retrouvé dans un filet. Des gens m'avaient capturé.
J'avais beau communiquer ma détresse à mes copains, ils ne pouvaient rien faire.
Ma vie a changé. Ce n'était plus beau comme avant, pourtant c'était supportable. Certains jours, je m'amusais même, surtout grâce à une jeune femme qui jouait tout le temps avec moi.
J'ai vite compris qu'elle voulait m'apprendre de nouveaux jeux et que je devais apporter le sourire à des enfants.
Les petits des hommes sont très mignons. Je me suis rapidement attaché à leur présence chaleureuse

Un soir, comme j'avais depuis quelque temps observé un trou dans le filet qui séparait le bassin où je logeais et la mer, je me suis évertué à l'élargir. J'avais de quoi le faire. J'avais appris, avec le temps, à me servir de divers objets que les humains utilisaient eux-mêmes et qu'ils avaient laissés, negligemment, sur le rebord du bassin.
J'ai mis des jours entiers à élargir ce trou. Une nuit, j'ai réussi à me glisser et j'ai enfin retrouvé l'océan. Impossible de vous décrire ma joie, cette sensation de liberté que seule une maison peut donner